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RECUEIL DE SKETCHS

 

(En cours d’édition) sous le titres « Impromptus pour rire » dont voici le contenu :

 

               

 

 

Impromptus

 

 

(Scènes de la vie extraordinaire)

  

   Gérard Duvallet

 IMPROMPTUS72

Sommaire :

 

- Le martyr

 

- L’échine souple

 

- L’apéro en duo

 

- Problèmes de cœur

 

- Le mari de la VRP

 

- L’endosseur

 

- L’histoire de la photo

 

X X X X X X X X


Le Martyr 

 

 

Personnages : (famille bourgeoise coincée)

L’homme : Entre 50 et 60 ans. Classique. Timide. Faible

La mère : Entre 70 et 80 ans. Classique. Cultivée.

La femme : Entre 40 et 50 ans. Classique. Dynamique

La sœur : Entre 40 et 50 ans. Maîtresse femme. Stricte

La fille : Entre 20 et 30 ans. Délurée. Sentimentale.

 

(L’homme est assis dans un canapé et lit une revue masculine. Il la pose)

- L’HOMME (faible, désabusé): Ils sont extraordinaires dans ces revues ! Ils savent tout sur les rapports hommes femmes. Ou plus exactement, ils croient tout savoir. En fait rien n’est plus difficile à percer que le secret féminin, je peux vous en parler en connaissance de cause. (Il se lève) Moi quand j’étais petit, ma mère me disait…

 

- LA MERE : (Elle entre et l’interrompt) Mais tu es toujours petit ! A mes yeux, tu n’as jamais grandi et… sous la toise non plus !

 

- L’HOMME (mi-rebelle, mi-craintif): En réalité, tu m’as empêché de grandir ! Dès ma naissance, tu m’as pris en charge pour ne plus me lâcher. Je suis à l’âge de la retraite et tu es encore là à me materner.

 

- LA MERE : Mais c’est parce que tu n’as jamais su te débrouiller sans moi !

 

- L’HOMME : La faute à qui ? Je n’ai jamais pu m’exprimer librement. Tu n’as jamais voulu qu’on enlève les petites roues arrière à mon vélo ! Tu n’as jamais voulu que je joue au foot ! Je serais peut-être devenu Bernard Hinault ou Zinedine Zidane ! Non ! Il a fallu que j’aille à la danse. J’étais le seul garçon alors mes copains me traitaient de tarlouze !

 

- LA MERE : Mais j’ai essayé de te mettre au sport. La première fois, tu t’es fait une entorse en enfilant tes baskets ! La seconde, tu n’as pas trouvé le gymnase. Alors que la danse, tu aimais ça la danse ! Tu dansais d’ailleurs très bien… pour un garçon…

 

- L’HOMME : Tu vois, tu te moques ! Tu me rabaisses sans arrêt. Tu me couves, tu m’étouffes !

 

- LA MERE : Mon pauvre garçon. Tu dérailles. Quand tu t’es marié, tu n’étais plus sous ma dépendance, je t’ai confié à une femme charmante et… (Elle s’assoit et prend la place du fils dans le canapé)

 

- L’HOMME : (il l’interrompt) Confié ! C’est le mot. Tu as choisi ma femme. Une femme qui me tient en laisse. Je croyais trouver la liberté. J’ai trouvé une nouvelle couveuse. Dès le mariage, ma femme me disait…

 

- LA FEMME : (Elle entre et l’interrompt) Mais tu es libre mon ami ! Tu vas et viens à ta guise que je sache…

 

- L’HOMME : Parlons-en de ma guise. Un boulot de merde dans l’usine de ton père. Des week-ends de merde chez ton père et des vacances de merde chez ton père dans une baraque pourrie au fond de la Corrèze où il flotte toute l’année !

- LA FEMME : Ne dénigre pas papa s’il te plaît. Sans lui, tu aurais fait une carrière de petit fonctionnaire. J’ai entendu ta mère, elle a raison. Tu es toujours petit. Tout ce que tu fais est petit. Comme le fait de critiquer notre propriété de Ussel. Une magnifique demeure familiale dans un site splendide. Tu préfèrerais peut-être t’entasser sur les plages au milieu de la populasse bruyante…

 

- L’HOMME : Au moins ils bougent eux ! Ils vivent ! Le bruit, la foule, c’est l’aventure moderne. Nous, nous restons toujours hors du circuit. Une fois ! oui, une fois ! Je suis allé boire un verre avec des collègues dans un bar, tu me l’as reproché pendant des semaines.

 

- LA FEMME : Evidemment ! Tu es rentré ivre ! Tu as perdu six points de ton permis et il a fallu te récupérer au commissariat. (Elle s’assoit près de la mère) Tu n’es pas doué pour l’aventure comme tu dis. Et ce n’est pas à ton âge que tu vas te lancer dans une vie aventureuse… (Les deux femmes complices éclatent d’un rire sarcastique)

 

- L’HOMME : Je ne cherche pas une vie aventureuse, je cherche une vie tout court. Un peu d’air frais après tant d’années de… pollution.

 

- LA MERE ET LA FEMME (Se lèvent d’un bond: en chœur) : C’est nous la pollution ?!

 

- L’HOMME : Un peu… Vous êtes là, pesantes, présentes, je me demande si vous n’avez pas organisé un tour de garde depuis 25 ans pour que l’une de vous deux soit toujours près de moi… Je devrais d’ailleurs dire l’une de vous trois. Je ne peux pas oublier ma sœur. Cette chère sœur qui a grandi avec les honneurs de la famille. Première au concours général, polytechnicienne et directrice de l’usine de beau-papa. Autrement dit : mon patron.

Eh ? Dès qu’elle a su parler, c’est-à-dire à 15 mois, ma sœur me disait…

 

- LA SŒUR : (Entre une femme déterminée et guindée qui l’interrompt) Tu sais ce qu’elle te dit ta sœur !

 

- L’HOMME : Il ne manquait plus que toi ! L’exemple ! La droiture ! (Ricanement en aparté) La Christine Boutin de l’industrie !

(La mère s’est rassise. La soeur s’assoit dans un autre coin de la pièce)

 

- LA SŒUR : (A son frère. Glaciale) Je ne sais pas de quoi vous parliez mais tu m’as l’air bien excité. Tes reproches vont à ta sœur cadette ou à ton directeur ?

 

- L’HOMME : (Perd ses moyens) A, à, à… A toi, aux deux… Enfin, je ne reproche rien, je constate : tu n’es pas exemplaire, tu es chiante ! Tu n’es pas droite, tu es psychorigide… Bref… Imbaisable !

 

- LES TROIS FEMMES : (En chœur) Quoi ?

 

- L’HOMME : (Se recule puis, timidement) Eh ! D’ailleurs… Elle n’est même pas mariée…

 

- LA SŒUR : Parce que tu crois qu’il faut passer en mairie pour apaiser sa libido ?

 

- L’HOMME (Prend un peu d’assurance): Parce que tu as une libido toi ? Eh bien, j’aimerais connaître le ou les courageux qui sont venus s’aventurer sur ces terres hostiles…

 

- LA SŒUR : C’est moi la « terre hostile » ?

 

- L’HOMME : Bah… Tu es coiffée comme une gardienne de prison. Tu es tout le temps déguisée en pédégère… ou plutôt comme en PDG ! C’est dire la féminité qui se dégage de toi…

 

- LA SŒUR : (Se force pour garder son calme. Agacée mais moqueuse) Mais c’est la révolution on dirait !

(L’homme rentre la tête dans les épaules, craintif)

 

- LA MERE : Tu n’as pas honte de traiter ta sœur de cette manière. Elle qui se sacrifie chaque jour pour le bien être de la famille.

 

- LA FEMME : Tu vas faire des excuses tout de suite !

 

- LA SŒUR : Laisse, laisse. Le nain se rebiffe, enfin ! Il faut le comprendre le malheureux. Toutes ces années à nous laisser prendre les décisions à sa place. Au restaurant, il faut choisir son menu. Chaque matin, c’est l’une de nous trois qui choisit sa cravate. Il est incapable de sortir seul. Il faut lui trouver ses chaussettes, ses médicaments et sa tête, bien sûr, qu’il perd si souvent ! (Elle s’assied dans un fauteuil à l’opposé du canapé)

 

- L’HOMME : (Il se redresse) Mais c’est de votre faute tout ça. C’est vous qui m’avez confiné dans cet état de larve dépendante. Vous êtes ma drogue, mon héroïne… Non pas d’héroïnes, ce serait trop flatteur. Vous êtes mon lexomil ! Pour me tenir endormi… A votre merci… Pour me torturer… Les femmes avaient besoin de prendre une revanche et c’est tombé sur moi. Vous représentez ce féminisme à la con qui brise les hommes ! (Exalté) Moi, j’étais fait pour dévorer la vie à pleine dent mais c’est vous qui me l’avez bouffée la vie. Par tous les bouts. Protectrices mon cul ouais ! Castratrices… Vous êtes des castratrices… En résumé des casse-couilles ! (Un temps) Eh, même ma fille s’est jointe au sérail. Quand elle était petite déjà, elle me disait…

 

- LA FILLE : (Entrée décontractée. Elle l’interrompt) Qu’est ce qu’elle te disait ta fille ? Je n’ai jamais entendu autant d’éclats de voix dans cette maison depuis que mes tympans existent. Alors ? Qu’est ce qu’elle te disait ta fille ?

 

- L’HOMME : (Heureux de cette arrivée va vers sa fille) Tu me demandais pourquoi c’est toujours maman qui décidait. Je te répondais : « c’est comme ça. Il ne faut pas contrarier ta maman… » Et je sentais dans tes yeux que tu n’avais pas une haute idée de moi. Tu as toujours eu sur moi ce regard pesant, me faisant sentir ton mépris.

 

- LA FILLE : Avoue que tu le méritais. J’ai cru comprendre que la révolte avait sonné. Mais c’est trop tard p’tit père. Ta vie, tu peux pas la r’faire comme dirait l’autre. Ya pas qu’ton smoking qui est de travers. Ta vie est de travers. Tu t’attaques à l’Everest alors que tu n’es pas foutu de monter sur un escabeau ! Tu veux passer le cap Horn alors que tu te noies dans un verre d’eau ! Tu coules pépère, (Elle s’assoit sur le canapé à côté de sa grand-mère et sa mère) Tu coules !

 

- L’HOMME : (De nouveau abattu) Alors toi aussi… Pourtant, tu n’as jamais choisi mes cravates, toi. Alors pourquoi ? (Il lui tend les mains)

 

- LA FILLE : (Indifférente) Parce que c’est la jungle. Parce que c’est la loi du plus fort.

 

- L’HOMME : (Tendre) Mais je m’en fous d’être le plus fort ou le plus faible.

(Il prend les mains de sa fille qui se dégage) : Ce que je voulais, c’est un peu de respect…

(Il se tourne vers sa sœur qui le repousse) : Ce que je voulais, c’est un peu de complicité…

(Il s’adresse à sa femme qui tourne la tête) : Ce que je voulais, c’est un peu de tendresse…

(Il s’adresse à sa mère qui le dédaigne) : Ce que je voulais… C’est un peu d’amour…

 

- LA FILLE : Pauvre papa ! Tu seras toujours un doux rêveur. Il faut te faire une raison. De plus en plus, les femmes sont les plus fortes.

 

- L’HOMME : (Reprend de l’assurance) C’est facile. A quatre contre un ! Mais je n’ai pas dit mon dernier mot. Vous continuez de me persécuter. Alors je vais me blottir dans d’autres bras plus accueillants. Pour trouver un peu de cette tendresse que vous me refusez, un peu de cette indépendance dont j’ai tant besoin. Tous les êtres de ce monde n’ont pas des cœurs de pierre comme les vôtres. Je sais où trouver un peu d’amour…

 

- LA FEMME (Se lève, jalouse): Tu as une maîtresse !

 

- LA MERE (Se lève, dubitative) : Tu as une maîtresse ?!

 

- LA SŒUR (Se lève, moqueuse : Tu as une maîtresse, Toi ?!

 

- LA FILLE (Reste assise, amusée) : Tu as une maîtresse ? Non !

 

- L’HOMME : (Se retourne face public, un homme apparaît dans son dos. Ils s’étreignent) Non… Un amant !

 

                                                     

 

 FIN

 

 

 

X X X X X X X X X

 


  

IMPROMPTUS CHANTAL72

L’échine souple

 

 

PERSONNAGES :

 

Médecin : âge et sexe indifférent.

 

Patient : âge et sexe indifférent.

 

 

Décor : Cabinet médical de consultation. Le médecin écrit derrière son bureau.

 

- LE TOUBIB : Entrez mon ami. C’est pour la visite d’embauche ?

 

- LE PATIENT : Oui, effectivement…

 

- LE TOUBIB : Oui, j’ai là votre fiche. Vous avez déjà subi le test du pliage ?

 

- LE PATIENT : Du pliage ?

 

- LE TOUBIB : Oui, du pliage !

 

- LE PATIENT : Quel pliage ?

 

- LE TOUBIB : Eh bien le pliage du dos pour vérifier votre aptitude à courber l’échine…

 

- LE PATIENT : Et ça consiste en quoi ?

 

- LE TOUBIB : Vous devez comprendre qu’un employeur moderne dans une société de compétition ne peut pas accepter de contestations. Une entreprise de notre époque face à la concurrence asiatique doit s’entourer de collaborateurs souples et disciplinés.

 

- LE PATIENT : Vous voulez dire soumis ?

 

- LE TOUBIB : Je n’ai pas dit cela. En pleine mondialisation, l’occident doit s’adapter. Vous n’avez pas manqué de constater que les asiatiques courbent le dos facilement. Leur moindre intervention orale s’accompagne d’une inclinaison du corps vers l’avant. Ce qui constitue un signe d’approbation des rites de l’entreprise et engendre donc une meilleure efficacité au travail.

 

- LE PATIENT : Je ne vois pas très bien le rapport.

 

- LE TOUBIB : Ecoutez, vous ne me semblez pas disposé à vous plier à une discipline rigoureuse. Souhaitez-vous réellement effectuer ce test ?

 

- LE PATIENT : Evidemment ! Ca fait six mois que je suis au chômage. Je ne vais pas rater une occasion pareille !

 

- LE TOUBIB : Bien. Levez-vous. (L’homme se lève). Non asseyez-vous. Voyons d’abord la position assise. (L’homme se rassoit). Donc, je suis votre supérieur hiérarchique et je vous demande d’exécuter un ordre. Que faites-vous ?

 

- LE PATIENT : Ca dépend de l’ordre…

 

- LE TOUBIB : Bon, ça commence mal. Vous devez acquiescer avec une légère inclinaison vers l’avant. Comme ceci (Le toubib se penche vers le patient).

Allez-y…

 (Le patient exécute un semblant de courbette vers l’avant)

LE TOUBIB : Non, avec plus de bonne volonté ! Vous vous retenez là ! On sent que vous renâclez !

 

- LE PATIENT : Bah, c’est-à-dire que si l’ordre ne me convient pas et que je l’accepte en me courbant, c’est moi qui l’ai dans le dos !

 

- LE TOUBIB : Bon, essayons debout. (Les deux se lèvent) Mais là, il faut vous plier… au rituel des gens bien élevés. Dès votre entrée, vous devez vous incliner. (Le toubib mime une légère inclinaison élégante). Allez-y…

 

- LE PATIENT : En fait, je salue quoi…

 

- LE TOUBIB : Oui, si vous voulez…

 

- LE PATIENT : (lève la main d’un petit signe sans s’incliner vraiment) M’sieur…

 

- LE TOUBIB : Mais non ! Que faites-vous ? On dirait que vous retrouvez un vieux pote pour l’apéro ! Soyez plus déférent !

 

- LE PATIENT : C’est quoi déférent ?

 

- LE TOUBIB : Respectueux si vous préférez. Bon, reconcentrez-vous et montrez-moi que vous savez entrer correctement dans le bureau d’un directeur.

(Le patient s’exécute avec une inclinaison maladroite démontrant une évidente mauvaise volonté)

 

- LE TOUBIB : Non ! Si vous entrez de cette manière, vous allez tout de suite vous mettre à dos la personne qui vous reçoit. Vous devez marquer plus nettement votre courbure en signe d’approbation des ordres que vous allez recevoir.

 

 

 

- LE PATIENT : Et pourquoi pas me mettre à genoux pendant que vous y êtes !

J’en ai plein le dos de vos simagrées ! Depuis dix minutes, vous ne me parlez que de me plier en deux devant des chefs. Pour savoir si je suis apte à l’emploi proposé, vous devriez m’ausculter, me prendre la tension, me tâter le pouls et le reste…

 

- LE TOUBIB : Qu’est-ce que vous entendez par le reste ? Restez correct jeune homme et… pliez-vous à ma consultation ! Je la mène comme je l’entends et vous n’avez pas à juger de ma façon de pratiquer. Quand vous aurez le nez dans vos dossiers, je n’irai pas derrière votre dos contrôler votre travail ! Alors laissez-moi faire le mien !

 

- LE PATIENT : Bon, j’ai déjà mal dans le dos à force de m’incliner. On pourrait pas passer à un autre test ?

 

- LE TOUBIB : Si vous voulez. Nous allons essayer l’interpellation. Vous voyez, là, je prends votre pouls. (Le toubib lui place un tensiomètre sur le poignet et regarde une sorte de i-phone comme s’il avait le résultat télétransmis)

 

- LE PATIENT : C’est quoi l’interpellation ?

 

- LE TOUBIB : Vous marchez dans les couloirs et un supérieur vous interpelle. Quel est votre comportement ?

 

- LE PATIENT : Ca dépend, mais je ne vois pas le côté médical dans tout ça. Vous êtes psy ou quoi ?

 

- LE TOUBIB : Je suis ce que je suis ! Vous passez une visite d’embauche et vous contestez sans arrêt ! Voulez-vous subir le test de l’interpellation oui ou non ?

 

- LE PATIENT : Bah oui… Je cherche du boulot…

 

- LE TOUBIB : Donc, Vous marcher dans les couloirs et un supérieur vous interpelle. Quel est votre comportement ?

 

- LE PATIENT : Ca dépend…

 

- LE TOUBIB (S’énerve) : Non ça ne dépend pas ! Il n’y a qu’une attitude possible dans ce cas. Vous vous retournez prestement en préparant toujours une légère inclinaison au moment où vous vous retrouvez face à votre interlocuteur. (mime le geste).

 

- LE PATIENT : S’il m’appelle gentiment, je veux bien mais s’il me dit : « Eh Dugland ! Amenez-vous dans mon bureau ! », vous croyez quand même pas que je vais lui faire une courbette. Je suis pas venu ici pour apprendre à danser le menuet moi ! Je cherche du boulot ! (il se rapproche du toubib d’un air menaçant) Du boulot ! Vous comprenez ça : du boulot !!!

 

- LE TOUBIB : Vous me menacez !

 

- LE PATIENT (Attrape le toubib par le col) : Je vais vous en faire une moi, une visite médicale ! Je vais vous faire marrer, comme çà, vous pourrez vous plier en deux ! Et si y’a besoin, je vous vous aider à vous plier en deux !

 

- LE TOUBIB : Vous me faites mal, je vais appeler ! (Il tente un « au secours » mais le patient lui serre le cou et le cri avorte).

 

- LE PATIENT (Il allonge le toubib sur la table d’auscultation et le triture sur tout le corps) : Et là vous avez mal là ! Et là, ça fait quoi quand j’appuie (Le toubib pousse des petits cris de douleurs. Il prend le toubib par la cravate et le ramène au bureau. Il tient la cravate de la main gauche et il écrit sur le bloc d’ordonnance de la main droite) : Avant de partir, je vais vous faire une petite ordonnance, moi. Vous vous inclinerez matin et soir pour recevoir un bon coup de pied au cul par un de vos proches. Vous vous pencherez sur les problèmes des chômeurs tous les jours. Allez ! Penchez-vous (Il tire la cravate vers le bas). Vous vous plierez en quatre pour favorisez l’embauche de vos patients (Il tire encore sur la cravate). Allez, pliez vous en quatre ! Et enfin, vous plierez en deux ma feuille d’embauche datée et signée. (Le toubib s’exécute et s’effondre, plié en deux sur son bureau. Le patient sort) : Eh, ne restez pas plié comme ça, vous allez avoir mal dans le dos ! (Rire du patient).

 

                                                   

 

FIN

 

 

X X X X X X X X


 


Apero en duo

 

 

Personnages :

 

Deux hommes : un jeune et un vieux

 

 

Décor : Une table de bistro. Un litron. Deux verres. Au fur et à mesure de la conversation, l’état d’ébriété va s’avancer au fil des verres.

 

 

- LE VIEUX : Tu verras qu’un jour, on viendra surveiller chez toi c’que tu bois !

 

- LE JEUNE : Ca c’est bien possible ! Déjà qu’il faut se planquer de sa femme, de son patron ! Bientôt, ils vont inventer une « police de surveillance à domicile ». T’as vu, ils interdisent les apéros géants. Tout ça parce qu’un taré est tombé d’une passerelle avec deux grammes dans le sang ! Sur la route, y’a des morts tous les week-ends. C’est pas pour ça qu’ils ferment les boîtes de nuit !

 

- LE VIEUX : Ou qu’ils empêchent les blaireaux d’aller se tuer sur la route en allant poser des chrysanthèmes sur les tombes. T’avoueras que c’est un comble : mourir en allant fleurir une tombe…

 

- LE JEUNE : Tu vas pas que les tombes toi ? (Il remplit les verres)

 

- LE VIEUX : Moi ? Non ! J’ai fait incinéré mes parents. Ils étaient pas d’accord mais, dans leur état, ils pouvaient plus rien dire. C’est moins cher que le marbre. Tu prends des cercueils en bois ordinaire et basta : ça crame plus vite…

- LE JEUNE : T’as fait quoi des cendres ?

 

- LE VIEUX : Je les ai mises aux pieds des hortensias. Comme les cendres étaient bleues, ça remplace l’ardoise pilée pour bleuir les fleurs. C’est la fleuriste qui me l’a dit…

 

- LE JEUNE : Tiens, à propos d’ardoise, il va falloir que je règle la mienne chez Lulu…

 

- LE VIEUX : Tu va encore au bistro toi ! T’as vu qu’ils ont foutu dehors les fumeurs ! Eh bien tu verras qu’un jour, on pourra plus boire en public… A cause des vapeurs d’alcool. Si, si ! Tu verras… (Il remplit les deux verres). Quand tu prends tes deux trois pastaga le matin vers 7 heures, t’auras toujours des types pour aller te faire un procès parce qu’ils ont chopé une cirrhose du foie en buvant leur petit café… A cause des é-ma-na-tions !!!

 

- LE JEUNE : Moi j’trouve au contraire qu’ils devraient payer une tournée pour avoir respiré les apéros des autres !

 

- LE VIEUX : Pas con ça ! D’autant qu’on dit que l’anis, c’est bon pour la santé.

 

- LE JEUNE : Pas que d’ailleurs. Pas que l’anis ! Le vin aussi (il sert les deux verres). Si t’en bois pas trop hein ! Juste… deux ou trois bouteilles par jour. Et bah, ça a des vertus pour la santé qu’y disent. Les Américains ont démontré que le tannin qu’est dans le pinard, ça pouvait prolonger la vie ! Ils appellent ça le régime crétois : fruits, légumes, poissons, huile d’olive et vins tanniques !

 

- LE VIEUX : Putain ! T’en sais des choses toi ! Eh bah moi, j’en sais des choses. Je vais t’apprendre un truc ! Dans le vin, y’a des dizaines, peut-être même des centaines de produits différents. Et même de l’éthanol !

 

- LE JEUNE : Arrête tes conneries ! L’éthanol, c’est pour mettre dans les bagnoles, c’est du carburant !

 

- LE VIEUX (Légèrement éméché) : Bah justement, c’est fait pour carburer ! Mais attention gamin! Ya du bon et du mauvais éthanol. Alors là, je sais pas comment qu’on fait pour les séparer… (Il sert les deux verres) Tiens, reprends un p’tit coup d’éthanol…

 

- LE JEUNE : Tu crois qu’c’est bon pour le foie, l’éthanol ?

 

- LE VIEUX : Tu remarqueras déjà que ça ressemble à un nom de médicament… Ethanol, paracétamol, phlorogu… phloroglunol… phlorogluco… Ah merde, c’est un truc pour les gosses, pour le mal au ventre : phloroglucinol, et même du menthol !

 

- LE JEUNE : Mais non ! Le menthol, c’est dans les bonbons…

- LE VIEUX : Tu rigoles ! J’au vu ça à la télé : y paraît que la moitié des médicaments, c’est comme des bonbons, y appellent ça des pasibeaux…

 

 

- LE JEUNE : (Eméché. Eclate de rire) Il est con ! Pas des pasibeaux ! Des placebos !!!

 

- LE VIEUX (Léger crescendo dans la soûlographie. Il bafouille) :Si tu veux, des plaçabos… Des pasibeaux… Donc, bref, j’en déduis que l’éthanol, c’est pas mauvais pour le foie ! (Il sert les deux verres) Allez, encore un p’tit coup d’éthanol. Tiens là, d’après ton régime à toi, ton régime cratois… rien qu’avec c’qu’on a bu aujourd’hui, ça va nous prolonger la vie d’au moins une semaine…

 

- LE JEUNE : Ouais mais ya les fruits et les légumes aussi ! Y paraît qui faut en manger cinq par jour…

 

- LE VIEUX : (il se lève, légèrement déséquilibré) Bah, c’est pas un problème ! Un ezemple au hasard : tu prends d’la vodka, qu’est-ce c’est la vodka ?

 

- LE JEUNE : Je sais pas…

 

- LE VIEUX : c’est de la betterave ! En Pologne, ils fabriquent la vodka avec de la betterave. Si, si ! Tu vois, ça fait un ! (Il compte sur ses doigts maladroitement). Derrière, tu t’enfiles une p’tite poire, direct ! Ca passe tout seul… Ca fait glisser… (Un temps.)

 

- LE JEUNE  (Lui aussi en crescendo de soûlographie) : T’es sûr que ça fait le même effet de manger une poire et de boire une poire ?

 

- LE VIEUX : C’est toi la poire ! Evidemment que c’est la même chose. Je dirais même plus parce que pour fabriquer un petit verre de poire, il faut au moins une dizaine de poire ! Alors tu vois, dix, c’est mieux qu’une ! (Il compte à nouveau sur ses doigts avec maladresse). C’est comme pour le schnaps…

 

- LE JEUNE : Le quoi ?

 

- LE VIEUX : Le schnaps…

 

- LE JEUNE : Le chapss ?

 

- LE VIEUX (Fin saoul) : Non ! Le schnaps ! Un truc raide qu’y boivent dans le nord. Je te dis pas comment ça réveille…

 

- LE JEUNE (Egalement saoul) : Le chapss ?

- LE VIEUX : Non ! Le  schnaps ! Eh ben, qu’est-ce c’est le schnaps ? Hein ? (Enervé) De la patate ! C’est rien que de la patate ! Bon, ça fait combien tout ça… La betterave, la poire, la patate… Après, faut qu’tu dégraisses. Pour dégraisser, ya un truc super, c’est le trou normand. Et qu’est-ce c’est le trou normand ?

 

- LE JEUNE : Ca je sais ! C’est du Calvados !

 

- LE VIEUX : Et qu’est-ce c’est le Calvados ?

 

- LE JEUNE : De la pomme !

 

- LE VIEUX : Ezact !

 

- LES DEUX : (Ensemble, debout) De la pomme ! Rien que d’la pomme ! (Le jeune se rassoit)

 

- LE VIEUX : Bon, on se calme… Et pis tu termines avec une tite mirabelle…

 

- LE JEUNE : une tite hein. Une tite !

 

- LE VIEUX : Ouais, une tite ! Bah ça y est, t’as tes cinq fruits et légumes. Et encore… (Il montre son verre) J’te compte pas l’raisin !!!

 

- LE JEUNE : (Il attrape le vieux par le bras et le rassoit. Il sert les deux verres) T’as raison, assieds-toi et prends un peu de raisin…

 

- LE VIIEUX : Doucement hein… parce que je conduis…

 

- LE JEUNE : C’est ça… Allez bois parce que je sais pas si on aura l’temps d’aller faire les courses…

 

                                                   

 

 

 

 

  FIN

 


  X X X X X X X X X X X

 

 

 

Problèmes de coeur

 

 

 

Personnages :

 

Médecin : Femme âge in différent

 

Patient : Homme d’âge moyen

 

 

Décor simple, si possible un bureau avec chaise ou fauteuil côté jardin. Une chaise côté cour.

 

 

(Une femme en blouse blanche avec un stéthoscope autour du coup appelle)

 

 

- LA TOUBIB : Au suivant !

(Un homme entre)

 

- LE PATIENT : Bonjour…

 

- LA TOUBIB : Alors, dites-moi tout !

 

- LE PATIENT : Vous savez, je suis timide. Alors vous dire tout…

 

- LA TOUBIB : Je comprends. Je veux dire, dites-moi ce qui ne va pas. Vous savez, je suis une sorte de confidente…

 

- LE PATIENT : J’entends bien mais…

 

- LE TOUBIB : C’est déjà çà !

 

- LE PATIENT : Quoi donc ?

 

- LE TOUBIB : Je veux que je suis heureuse de savoir que vous entendez bien…

 

- LE PATIENT : Ah… Vous êtes heureuse vous ? Vous avez de la chance…

 

- LE TOUBIB : Oh là ! Je sens un moral qui vacille. Que se passe-t-il donc ? Où avez-vous mal ?

 

- LE PATIENT : Au cœur…

 

- LA TOUBIB : Vous avez des nausées ?

- LE PATIENT : Non, mais j’ai mal au cœur de voir tout ce qui m’entoure. La misère partout. Même en France…

 

- LA TOUBIB : C’est tout à votre honneur mais si vous assumez toutes les misères du monde sur vos frêles épaules, vous ne tiendrez pas.

 

- LE PATIENT :  Mais ça me désespère de savoir qu’on n’en verra jamais le bout. Pour vous, les toubibs, le coeur c’est un muscle. Tout ce qui vous intéresse, c’est que la pompe fonctionne. Pour le reste, à chacun ses problèmes…

 

- LE TOUBIB : En fait, ce n’est pas le coeur dont vous parlez. On a l’habitude de ramener nos émotions à cet organe mais c’est le cerveau qui gère nos sentiments, nos resentiments.

 

- LE PATIENT : N’empêche, quand on est amoureux, on a parfois comme un noeud au creux du ventre.

 

- LE TOUBIB : Vous êtes un obsédé des viscères vous !

 

- LE PATIENT : Je suis surtout un obsédé de la vie chère ! Quand on voit par exemple ce que certains de vos collègues nous demandent comme dépassements d’honoraires !

- LE TOUBIB : En effet. Mais nous ne sommes pas là pour régler les problèmes du ministère de la santé mais plutôt ceux de la santé de votre ministère... Tiens ! Je ne suis pas mécontente de la formule !

 

- LE PATIENT : Alors ? Vous allez trouver la bonne formule pour soigner mes problèmes de cœur ?

 

- LE TOUBIB : Le problème, c’est l’absence de communication. Il y a aussi de nombreuses femmes qui cherchent à résoudre leurs problèmes de coeur. Il suffit d’aller vers elles ! Avouez que c’est aussi bien que les agences matrimoniales ou, pire encore, les rencontres sur internet, soit disant le rendez-vous des coeurs perdus !

 

- LE PATIENT : Qu’est-ce que vous avez contre internet ? Moi, j’ai un copain qui a rencontré sa femme sur la toile. ET ils sont très heureux ! Dans les forums de rencontre, y’a plein de femmes à toile ! Et des belles ! Et des gentilles !

 

- LE TOUBIB : Si je comprends bien, vous êtes vous-même un habitué du surf.
Après tout, pourquoi pas. C’est une forme de communication moderne qui se généralise. Voilà de quoi vous faire des amies de coeur...

 

 

 

 

- LE PATIENT : Pensez-vous...  Je me prends des bides monumentaux. Je suis le roi du gadin, le chevalier de l’échec ! Vous êtes là devant l’écran (il mime), les phrases s’enchaînent, de plus en plus intimes, les questions et les réponses s’emboîtent parfaitement. Et d’un seul coup, au moment où vous croyez conclure, patatras ! C’est la panne !

 

- LE TOUBIB : La panne de courant ?

 

- LE PATIENT : Mais non ! La panne des sens ! A chaque fois, j’ai un coup au coeur ! Je sais pas pourquoi mais ça foire. Et toujours au même moment...

 

- LE TOUBIB : Sans être indiscrète, je peux savoir à quel moment ?

 

- LE PATIENT : Quand je leur parle avec le coeur, du fond du coeur !

 

- LA TOUBIB : C’est étrange tout de même. En général, les jeunes filles apprécient qu’on leur parle avec coeur. La plupart ont elles-mêmes un coeur de midinette vous savez. Les filles prétendent le contraire mais elles adorent qu’on leur conte fleurette. Peut-être est-ce la manière qui ne convient pas. Que leur écrivez-vous ?

 

- LE PATIENT : Rien de spécial. Que je sens une incompréhension...

 

- LA TOUBIB : (attitude genre Mireille Dumas, tête en l’air, main sous le menton) oui...

 

- LE PATIENT : Puis une certaine complicité...

 

- LA TOUBIB : Bien...

 

- LE PATIENT : (léger crescendo) Après je vais plus loin, je dis que je sens comme une osmose s’installer !

 

- LA TOUBIB : Bien, très bien ça...

 

- LE PATIENT : (léger crescendo) ... Que mon coeur lui appartient !

 

- LA TOUBIB : C’est bon ça, la poésie, c’est très bon...

 

- LE PATIENT : (exalté) Qu’elle peut venir le chercher dans ma poitrine en l’ouvrant avec un couteau ! (il mime le geste d’un chirurgien) Qu’elle pourra le garder près d’elle tant qu’elle voudra ! Qu’il battra dans ses mains ! (Il mime un coeur qui bat dans ses mains) Qu’elle...

 

- LA TOUBIB : Pardon ? Là, c’est peut-être un peu trop… Vous pourriez passer pour un malade de…

 

- LE PATIENT : Je vous le dis depuis le début. Je suis malade du coeur...

 

- LA TOUBIB : Non mais là, je voyais plutôt du côté de la tête… On glisserait de la cardiologie vers la neurologie, voir la psychologie…

 

- LE PATIENT : Pourquoi un psy ? Vous m’avez dit que c’était bien et que...

 

- LA TOUBIB : (l’interrompant) C’était bien au début ! Et même au milieu... Mais qu’est-ce qui vous a pris de parler d’opération à coeur ouvert ?

 

- LE PATIENT : C’est pas bien d’ouvrir son coeur ? De donner son coeur ?

 

- LA TOUBIB : Virtuellement oui mais pas physiquement. C’est plus de l’amour, c’est de la boucherie !

 

- LE PATIENT : (Menaçant) Mais vous n’aimez personne vous. Tout à l’heure, vous méprisiez ceux qui se rencontrent sur internet. Maintenant, vous critiquez les bouchers. (La toubib recule, apeuré) Ils ont le droit d’aimer les bouchers, ils ont un coeur comme tout le monde. Et pas un coeur d’artichaut, c’est pour les végétariens ça ! (Véhément) Les bouchers, ils ont un coeur vivant, rouge avec du sang, du vrai sang bordel !

 

- LA TOUBIB : (Se lève) Excusez-moi. (Un temps. Elle recule de plus en plus puis s’arrête) Je… Je peux vous demander ce que vous faites dans la vie ?

 

- LE PATIENT : (Marchant vers elle, bras écartés, voix rauque) Je suis boucher. Pourquoi ?

 

(La toubib s’enfuit en courant, poursuivie par le malade, très malade !)

                                                   


 

  FIN

 

 


  X X X X X X X X

 

 

 

 

 

 

Le mari de la VRP

 

Personnages :

 

- Homme d’âge moyen entre 30 et 60 ans

 

- Voix off : Une femme faisant plusieurs voix ou plusieurs femmes + un homme d’âge indifférent.

 

Décor : Intérieur semi-bourgeois

Guéridon avec téléphone, fauteuil.

 

(L’homme marié à une VRP qui vend des produits de maison. Seul au domicile, il lui arrive de répondre aux clientes. Les voix des clientes sont en voix off. Il lit un journal assis dans un fauteuil près du téléphone).

 

(Le téléphone sonne)

 

 

- L’homme : Allo bonjour…

 

- Mme Henry (Elle roule les « r ») : Allo, c’est bien chez madame Rabier ?

 

- L’homme : Oui madame, ma femme est absente…

 

- Mme Henry : Ah bon… C’est madame Henry… parce que c’est la balayette de madame Jolivet, elle a pas de manche !

 

- L’homme : Pardon ?

 

- Mme Henry : Oui, c’est la balayette…

 

- L’homme : Je suis incompétent en matière de balayette madame, voyez ça avec mon épouse. Vous êtes donc Mme Henry. Je prends note, elle vous rappellera. Au revoir…

 

(Un temps. Le téléphone sonne)

 

- L’homme : Allo bonjour…

 

- Mme Ezencremer (familière) : Allo, bonjour M. Rabier, vous allez bien ?

 

- L’homme : (Surpris) : Euh… Oui madame, ma femme est absente, que puis-je pour vous ?

 

- Mme Enzencremer : Bah si vous puiviez dire à vot’ femme qu’elle me rappelle…

 

- L’homme : Bien madame, je puivrai…

 

- Mme Enzencremer : Bon, je la rappelle plus tard…

 

- Hein ??? C’est vous qui… Allo ? Allo ?

 

(Il raccroche, dubitatif. Un temps. Le téléphone sonne)

 

 

- L’homme : Allo bonjour…

 

- Mme Gauthier (Genre bavarde) : Bonjour monsieur, c’est mâme Gauthier. Je peux parler à mâme Rabier ?

 

- L’homme (Moqueur) : Lui parler, oui… Mais où, je ne sais pas…

- Mme Gauthier (Qui n’a pas compris l’humour) : Oui, parce que dans ma livraison, le colis de mâme Lamant est tout collé. Je voudrais savoir si faut que je l’ouvre avant de lui donner ?

 

- L’homme : Je vous arrête, ma femme est à l’extérieur…

 

- Mme Gauthier (L’interrompant) : Parce que, vous comprenez, si j’ouvre et qu’y manque un produit, on pourrait dire que c’est moi qui…

 

- L’homme (énervé) : Collez ou décollez madame ! Ouvrez le colis et fermez-la !!! (Il raccroche violemment)

 

(Un temps. Le téléphone sonne)

 

 

- L’homme : Allo bonjour…

 

- Mme Vallon (Grosse voix) : Oui, M. Rabier ?

 

- L’homme : Allo, bonjour monsieur.

 

- Mme Vallon : Non, c’est madame Vallon, mais j’ai l’habitude…

 

- L’homme : Pardon mon… madame, ma femme est en livraisons.

 

- Mme Vallon : Ouais je sais, elle sort de chez moi. J’ai pas l’habitude d’appeler chez eux les gens qui sortent de chez moi !

 

- L’homme : Pardon madame, alors de quoi s’agit-il ?

 

- Mme Vallon (Enervée) : Euh… Bah, je sais plus ! Vous m’avez fait perdre le fil avec vos simagrées !

 

- L’homme : Mes quoi ? Excusez-moi madame… Je… Allo ? (Il raccroche) Au revoir madame. (Il reprend le téléphone) Et puis non, au revoir MÔSIEUR !!!

 

(Un temps. Le téléphone sonne)

 

- L’homme : Allo bonjour…

 

- Mme Réac (Parlant très vite) : Bonjour monsieur, vous allez mieux ? Bon, j’appelle votre femme pour un problème de réunion qui était prévue le 15 et que je voudrais avancer au 14 parce que ma fille doit aller à Lille le 15 pour passer un examen à l’école de journalisme. Ah c’est vrai, vous êtes journaliste vous ! Alors vous allez comprendre.

 

- L’homme : Je…

 

- Mme Reac : Si j’ai pas les catalogues à temps pour le 14, y aura personne. Le 15 je suis avec ma fille à Lille. Et puis c’est pas sûr que votre femme pourra le 14. Mais je peux pas savoir avant de lui demander hein ?

 

- L’homme : Je…

- Bon, ou alors le 16, je sais pas. J’espère qu’elle pourra le 14 parce que je préfère le 14. Le 16, c’est moins pratique. On sera rentrés dans la nuit. J’espère que l’examen se passera bien. C’est dur ces examens. Hein ? C’est dur ? Vous savez pas si c’est dur ?

 

- L’homme (Lassé) : Ne quittez pas, Je vous passe ma femme ! (Il appuie sur un bouton) Allo, Je te passe une dame qui va à Lille le 15 ! Si tu ne réponds pas, c’est moi qui vais faire le 15, le SAMU !

 

(Un temps. Le téléphone sonne)

 

 

- L’homme : Allo bonjour…

 

- Mme Lefort (Déterminée): Allo, ici madame Lefort, comme fort F-O-R-T. J’ai un problème. J’ai commandé un lustrant E 604-22 et j’ai reçu un cireur E 603-22. Evidemment, je ne peux pas m’en servir. Il faut me le reprendre !

 

- L’homme : Certainement madame, bonjour… Mais ma femme est sortie alors…

 

- Mme Lefort : Alors vous ne pouvez pas enregistré ma plainte ?

 

- L’homme : Vous savez moi, les  603, les 604, je ne suis pas compétent…

 

- Mme Lefort : C’est bien notre époque ça ! Personne n’est plus compétent. Je rappellerai !

 

- L’homme (Désabusé) : C’est, ça… et au revoir quand même…

 

(Un temps. Le téléphone sonne)

 

- L’homme : Allo bonjour…

 

- Mme Gauthier : Allo monsieur Rabier ?

 

- L’homme : Oui…

 

- Mme Gauthier : C’est mâme Gauthier. Oui, c’est mâme Vimbert, elle a commandé la serpillière pour le balai. Mais c’est pas l’ancien balai en long, c’est le nouveau en triangle. Donc elle va vous rendre l’autre serpillière parce que elle en veut deux. Celle qui gratte…

 

- L’homme : Madame, je… Ma femme est…

 

- Mme Gauthier : Oui, c’est pour dire à vot’ femme que mâme Vimbert, elle a commandé une serpillière pour l’ancien balai. Mais c’est pas la bonne. Parce que elle veut en fait deux serpillières pour le nouveau balai, voilà...

 

- L’homme : Ma femme est absente, je ne suis pas sûr de pouvoir prendre votre commande, je…

 

- Mme Gauthier : C’est ça, vous prenez la commande des deux serpillières, celle qui gratte et celle qu’est douce !

- L’homme (Agacé) : Oui, oui, c’est noté madame, c’est noté… Au revoir (Il raccroche et soupire)

 

(Un temps. Le téléphone sonne)

 

 

- L’homme : Allo bonjour…

 

- Mme Beaufils : Allo bonjour, je voudrais parler à madame Rabier. J’ai un produit qui va pas. C’est le lustrant pour cuir, ça fait drôle sur les chaussures…

 

- L’homme : Ma femme est absente madame. Je ne suis pas très compétent mais je crois qu’il s’agit d’un produit pour les fauteuils et pas pour les chaussures…

 

- Mme Beaufils : Ah bon ?

 

- L’homme : Et vos chaussures, vous êtes certaine que c’est du cuir ?

 

- Mme Beaufils : Ah je ne sais pas…

 

- L’homme : C’est peut-être pour ça que ça fait bizarre ?

 

- Mme Beaufils : Ah oui…

 

- L’homme : Ma femme vous rappellera…

 

- Mme Beaufils : Ah oui…

 

- L’homme : Au revoir madame.

 

- Mme Beaufils : Ah oui…

 

- L’homme (Il raccroche) : Quelle tache !!!

 

(Un temps Le téléphone sonne)

 

- L’homme : Allo bonjour…

 

- Maria : Allo, bonchour mosieur Rabière , ch’est Maria, la chœur de madame Logadogalves…

 

- L’homme : Oui madame, mais ma femme est absente…

 

- Maria : Ch’est pas glave, vous allez dire à madame douballet que je n’ai plus de poils !

 

- L’homme : Pardon ?

 

- Maria : Ch’ai perdu touch les poils du balai qui chont tombés dans les véchés. Alors cha bouche tout et mon mari, il dit qu’il faut appeler Madame Rabière.

 

- L’homme : Oui, mais elle est absente. Elle va vous rappeler…

 

- Maria : Ch’est chur ?

 

- L’homme : Tout à fait madame, j’ai noté le problème… Au revoir madame. (Il raccroche)

 

(Un temps. Le téléphone sonne)

 

 

- L’homme : Allo bonjour…

 

- M. Bondais (Toute petite voix aiguë) : Allo bonjour, monsieur Rabier…

 

- L’homme : Oui. Bonjour madame…

 

- M. Bondais : Non, c’est monsieur Bondais, j’ai une petite voix, j’ai l’habitude.

 

- L’homme : Pardon… C’est à quel sujet ?

 

- M. Bondais : Je voudrais parler à madame Rabier pour les produits sansnôme.

 

- L’homme : Stanhome…

 

- M. Bondais : Oui, c’est ça sansnôme.

 

- L’homme : Non. Pas sansnôme, (Il décompose) Stan-home

 

- M. Bondais : Oui c’est ça, sansnôme. C’est pour un dégrippant qui dégrippe très bien.

 

- L’homme : Bon d’accord ! Ma femme est absente, je prends vos coordonnées et elle vous rappellera.

 

- M. Bondais : Bon, bah c’est d’accord, elle me rappelle… tut, tut, tut

 

- L’homme : Votre numéro ? Allo ! Et votre numé… (Il raccroche)

 

(Un temps. Le téléphone sonne)

 

 

- L’homme : Allo bonjour…

 

- Mme Gauthier : Allo, c’est mâme Gauthier !

 

- L’homme (s’esclaffe) : Ah putain !

 

- Mme Gauthier : Non ! Gauthier. Mâme Gauthier…

 

- L’homme : Oui, bonjour madame Gauthier.

 

- Mme Gauthier : Vot’ femme n’est pas là ?

- L’homme : Non madame, elle est sortie…

 

- Mme Gauthier : ça fait rien, vous allez comprendre. Vous me comprenez bien vous. Voilà, c’est pour les points cadeaux. J’en avais 1850 et le sac de voyage, il était à 1 900. Vot’ femme m’a dit qu’on pourrait s’arranger. Je vais commander un firs mat… (Elle prononce à la française)

 

- L’homme (Rectifiant en anglais) : First mate…

 

- Mme Gauthier : Non, un firs mat. Enfin, sur le bidon, c’est écrit comme ça ! Bon donc, je commande un firs mat et comme ça j’aurai 1 900 pour le sac ! Surtout, vous le dites bien à vot’ femme parce, des fois, y’en a plus quand on en veut.

 

- L’homme (heureux que la conversation se termine) : Je lui dirai madame. Soyez certaine.

 

- Mme Gauthier : Pas 1 850 mais 1 900 !

 

- L’homme : C’est ça, 1 900 ! Comme votre date de naissance ! Au revoir madame Gauthier ! (Il raccroche)

 

(Un temps. Le téléphone sonne)

 

- L’homme : Allo bonjour…

 

- Mme Martin (Voix de personne âgée): Allo bonjour…

 

- L’homme : Bonjour madame…

 

- Mme Martin : Allo bonjour…

 

- L’homme : Bonjour madame…

 

- Mme Martin : C’est pas madame Rabier ici ?

 

- L’homme : Non madame, c’est son mari…

 

- Mme Martin : Ah bon ! J’ai eu peur… des fois, je me trompe dans les boutons… Elle est là madame Stanhome… Euh pardon ! Madame Rabier ?

 

- L’homme : Non, madame mais je peux prendre un message.

 

- Mme Martin : Bah c’est mon carton, j’ai tout compté ce que j’avais acheté et j’ai pas tout ce que j’avais acheté…

 

- L’homme : Vous voulez dire qu’il vous manque un produit dans votre livraison…

 

- Mme Martin : Dans mon carton, ya pas tout ce que j’avais acheté.

- L’homme : J’ai compris madame. Donnez-moi votre nom et votre numéro, ma femme vous rappellera…

 

- Mme Martin : C’est madame Martin comme Jacques Martin, c’est le 01 34 77… 18 22 No

n ! 22 18… Non ! 01 34 77 28… Ah je sais pu !

 

- L’homme (Mentant) : Est-ce qu’il vous serait possible de rappeler madame, j’ai mon portable qui sonne.

 

- Mme Martin : Ah oui ! J’ai un numéro de portable, c’est le 06 09 08… 18 22 Non ! 22 18… Non ! Ah je sais pu…

 

- L’homme) : Merci de rappeler madame, au revoir…

 

(Un temps. Le téléphone sonne)

 

 

- L’homme : Allo bonjour…

 

- Mme Rejeras (Toute petite voix lasse et lente) : Bonjour monsieur…

 

- L’homme : Madame…

 

- Mme Rejeras : Je suis bien chez madame Rabier ?

 

- L’homme : Oui madame…

 

- Mme Rejeras : Elle est gentille madame Rabier…

 

- L’homme : Oui madame…

 

- Mme Rejeras : C’est pour ma réunion de demain… J’ai personne…

 

- L’homme : Oui madame…

 

- Mme Rejeras : Elle est pas là madame Rabier ?

 

- L’omme : Non madame… Mais je peux prendre un message…

 

- Mme Rejeras : Un message ? Ah oui… Un message… C’est pour ma réunion de demain… J’ai personne…

 

- L’homme) : Oui madame…

 

- Mme Rejeras : Ma belle-sœur a eu un accident de voiture alors je me suis cassé le bras…

 

- L’homme : Vous étiez dans la voiture…

 

- Mme Rejeras : Non, c’est quand on m’a annoncé l’accident, je suis tombé et…

 

- L’homme : J’espère que ce n’est pas trop grave…

 

- Mme Rejeras : Elle non, elle a rien mais moi, je me suis cassé le bras…

 

- L’homme : Je comprends madame…

 

- Mme Rejeras : Oui alors avec mon mari qu’est malade, demain j’ai personne…

 

- L’homme : Qu’est-ce que je peux faire madame ?

 

- Mme Rejeras : Bah, je voulais dire à madame Rabier que demain, j’ai personne…

 

- L’homme : Oui, et alors ?

 

- Mme Rejeras : Bah je sais pas si j’aurai du monde parce que pour l’instant, j’ai personne. Avec ma mère qu’est impotente, je peux pas aller la chercher avec mon bras cassé…

 

- L’homme (voulant faire de l’humour) : Et vos enfants ça va ?

 

- Bah pas fort. Le petit encore, lui ça va. Il fait pas trop de bêtises. Mais le grand, y fait rien à l’école. Et quand il fait quelque chose, c’est des bêtises.

Ca fait deux fois qu’ils veulent le renvoyer et…

 

- L’homme (Ennuyé) : Voulez-vous que ma femme vous rappelle madame ?

 

- Mme Rejeras : Oui mais alors ce soir tard parce que là je pars faire le ménage chez mes patrons…

 

- L’homme (Etonné) : Avec un bras cassé ?

 

- Mme Rejeras : Ah c’est vrai ça… Comment je vais faire… Je peux pas demander à ma fille aînée, elle va m’envoyer au pelotes, elle veut jamais rendre service. Faut dire qu’elle a pas de chance avec son petit copain qu’est en prison…

 

- L’homme (De plus en plus ennuyé) : Bien madame, ma femme va vous rappeler. Je vous souhaite que tout cela s’arrange.

 

- Mme Rejeras : Merci monsieur. Oh mais c’est pas grave hein ! On en a vu d’autres avec mon frère quand il a perdu sa femme jeune, avec trois enfants, avec…

 

- L’homme (Catastrophé) : Au revoir madame… (Il raccroche effondré)

 

 

(Un temps. Le téléphone sonne)

 

- L’homme : Allo bonjour…

 

- Melle Pique (Voix de pète sec) : Allo ! Mme Rabier je vous prie !

 

- L’homme : Elle est absente. Qui la demande ? Je peux prendre un message.

 

- Melle Pique : Non, pas de message ! J’ai un problème ! Elle m’a vendu un nettoyant pour carreau qui ne nettoie pas les glaces ! C’est incroyable ! Il faut un produit différent pour les glaces ?

 

- L’homme : Je ne sais pas madame…

 

- Melle Pique : Pas madame ! Mademoiselle !

 

- L’homme : Excusez-moi mada…moiselle

 

- Melle Pique : C’est de la vente forcée ! C’est inacceptable !

 

- L’homme : Je transmettrai mada…moiselle. Mademoiselle comment ?

 

- Melle Pique (Excitée) : Pique ! P-I-Q-U-E ! Je sais ça fait rire. Mais là, je n’ai pas envie de rire !

 

- L’homme : Mais pas du tout mademoiselle. Je prends note de votre réclamation.

 

- Melle Pique : J’y compte bien ! Au revoir monsieur !

 

- L’homme : Au re… Elle a raccroché… (Il raccroche) Au revoir Pétasse !…

 

(Un temps. Le téléphone sonne)

 

 

- L’homme : Allo bonjour…

 

- Mme Gauthier : Allo bonjour, c’est madame Gauthier…

 

- L’homme : Ah non ! Merde ! (Il raccroche, jette son journal et sort).

 

 

                                       

FIN

 

 

 

X X X X X X X X

 

 

 

 

L’endosseur

 

 

PERSONNAGES :

 

- DRH : indifférent d’âge et de sexe

 

- Endosseur : homme indifférent d’âge

 

 

(Décor simple, si possible un bureau avec chaise ou fauteuil côté jardin. Une chaise côté cour. Une femme en tailleur ou un homme en costume (DRH) appelle)

 

 

- LE OU LA DRH : S’il vous plaît !

(Un homme entre)

 

- LE CANDIDAT : Bonjour… C’est à moi ?

 

- DRH : Oui, asseyez- vous. (il consulte sa fiche). C’est pour une mission d’endosseur ?

 

- LE CANDIDAT : En principe oui…

 

- DRH : Bien. Vous connaissez le métier ?

 

- LE CANDIDAT : Euh… Oui, j’ai endossé pendant plusieurs années.

 

- DRH : Chez le même employeur ?

 

- LE CANDIDAT : Ben non ! Vous savez bien qu’à force d’endosser, vous finissez toujours par sauter !

 

- DRH : En effet… Et vous avez toujours endossé sans problème ? Jamais de refus sur l’obstacle au dernier moment ? (elle mime un cavalier d’équitation qui bute sur une barre à franchir)

 

- LE CANDIDAT : Jamais !

 

-DRH : Parfait. Côté santé, pas de souci ? Pas de déprime ? Parce qu’il n’y a rien de pire qu’un endosseur qui se met à déprimer au moment d’endosser une grosse responsabilité…

 

- LE CANDIDAT : (indigné) Jamais ! (ou monsieur)

 

- DRH : Pardonnez-moi mais il nous est arrivé d’avoir recours aux services d’un endosseur qui nous a fait un lumbago au moment crucial et je peux vous dire que nous avons frôlé la catastrophe… Vous comprenez, un lumbago (Elle montre son dos) pour un endosseur…

 

- LE CANDIDAT : Je comprends…

 

- DRH : Enfin, je sais qu’avec l’agence « DOS A DOS », nous n’avons rien à craindre. Votre réputation flatteuse vous précède.

 

 

- LE CANDIDAT : Je vous remercie. Vous connaissez notre devise : «  Avec DOS A DOS, l’endosseur endosse en douceur ! »

 

- DRH : Pas mal ! Nous allons donc parler de la mission qui va vous incomber si vous l’acceptez. Voilà : il s’agirait d’endosser quelques manipulations d’écritures commises par le fils de notre PDG afin de s’offrir une Ferrari sur le compte de la société.

- LE CANDIDAT : De quel montant les manipulations ?

 

- DRH : Environ un million d’Euros…

 

- LE CANDIDAT : Et cela irait chercher dans les combien ?

 

- DRH : Trois ans dont deux avec sursis si votre casier est vierge…

 

- LE CANDIDAT : (l’interrompant) : Non, je connais le tarif. Je veux dire combien de dédommagement ?

 

- DRH : Monsieur et moi avons pensé que l’honneur de la famille valait environ cent mille Euros. Cela vous convient-il ?

 

- LE CANDIDAT : Parfaitement. Quand dois-je endosser ?

 

- DRH : Eh bien, écoutez, si vous pouviez maintenant, ce serait parfait. La brigade financière se trouve en nos murs et nous souhaiterions éviter un interrogatoire trop difficile pour le jeune homme. Déjà qu’il devra rendre sa Ferrari, cela va lui faire un choc terrible. Alors, un interrogatoire, vous comprenez… Ces policiers sont tellement brutaux avec les jeunes de nos jours…

 

- LE CANDIDAT : (Se lève, prend le téléphone) Entendu, je comprends. Vous permettez, un coup de fil à ma femme pour la prévenir… (Il compose le numéro) Allo, oui, c’est moi. J’ai une nouvelle mission, je ne rentrerai pas ce soir… Tu m’apporteras mes affaires, comme d’habitude. Combien de temps cette fois. Oh… Environ douze mois (Il raccroche. A la DRH) : Je vous suis pour… endosser !

 

 

 

FIN

 

 

 

 

X X X X X X X X

 

 

 

 


L’histoire de la photo

 

 

 

 

 

PERSONNAGES :

 

- Homme de 60/70 ans ou grimé

 

- Jeune fille entre 18 et 30 ans

 

Décor : un pupitre de conférencier debout.

 

 

 

 

(Le vieil homme s’approche avec une épaisse liasse de papiers. La jeune fille est assise au premier rang dans la salle)

 

 

 

 

 

 

LE VIEUX: (Solennel. Voix un peu chevrotante) je vais vous parler aujourd’hui de l’histoire de la photographie. Et il y a bien des choses à en dire. J’utiliserai d’ailleurs plusieurs images pour illustrer mon exposé. Hé, Hé… (Il rit puis marque un temps) Image… Pour la photo… Vous saisissez l’astuce ? Pour inaugurer cette magnifique exposition sur la photographie, Je vais donc vous faire un bref historique. Rassurez-vous, j’ai synthétisé cette magnifique aventure en… une soixantaine de pages.

 

LA JEUNE : On n’est pas couché…

 

LE VIEUX : Vous dites ? (Il perd une trentaine de feuilles de papier en se penchant vers la jeune fille. Elle l’aide à les ramasser)… Merci mademoiselle, vous êtes bien gentille. Je disais donc que je vais vous faire un court… Non, pas un cours mais plutôt un court historique et donc un historique court sur ce qui devenu un art sur le tard puisque, désormais, comme disait la grenouille en regardant une photo de Lartigue : Tout est art !

Donc, à l’époque ou la photo en était à ses balbutiements, elle se pratiquait avec des chambres. C’est ce qu’on appelait un sport en chambre. Hé, hé (Il rit sous cape) Vous connaissez le principe, pour graver à l’envers une photo que l’oeil voyait à l’endroit, le photographe devait faire les pieds au mur…

 

- LA JEUNE : Quoi ? C’est quoi ce délire ? On n’a jamais vu un photographe la tête en bas !

 

- LE VIEUX : Absolument mademoiselle ! J’ai ici une gravure d’un photographe qui démontre justement que les photographes opéraient les pieds en l’air!

 

- LA JEUNE : (Elle se lève) Retournez la feuille (Il s’exécute, regarde la feuille et la retourne) Et comme ça, il a toujours la tête en bas votre photographe ?

 

- LE VIEUX : Ça par exemple ! Heu… Bon, admettons… (De mauvaise foi) De toute manière, il a la tête sous une bâche, alors on ne peut pas savoir si cette tête est en bas ou en haut !

 

- LA JEUNE : Et vous, votre tête, elle est… en l’air !

 

- LE VIEUX : Je ne vous permets pas mademoiselle ! Freluquette ! (Un temps) J’enchaîne. Si c’est Joseph Nicephore – Et même très fort – Niepce qui a inventé la photographie, ce sont les frères Lumière les bien nommés qui ont inventé la photo couleur, en peignant des pommes de terre… (Il se relit) Hein ? Quoi ? Si, si ! En peignant des patates en violet, vert et orangé ! C’est écrit là !

(S’adressant à la jeune fille) Et vous, ça ne vous choque pas ! On ne vous entend plus ! Je viens de dire une énormité et vous, ne bronchez pas !

 

- LA JEUNE : Je ne réagis pas parce que vous avez « presque » dit la vérité. En fait, il ne s’agit pas de peindre des pommes de terre mais de colorier des grains microscopiques de fécule de pomme de terre et de les laminer sur une plaque de verre. Ce n’est pas tout à fait la même chose !

 

- LE VIEUX : Autrement dit, d’après votre théorie, c’est grâce à Parmentier si on a pu manger des photos en couleur ?

 

- LA JEUNE : (Désabusée) C’est ça pépère ! Et c’est grâce à Voltaire qu’on peut manger des fauteuils à accoudoirs !

 

- LE VIEUX : Pardon ? (Un temps) Jeunesse arrogante ! Je poursuis mon exposé. Par la suite, les progrès aidant, le matériel s’est allégé pour devenir facilement portable. On a abandonné les chambres pour des appareils à soufflet qui se glissaient déjà dans une poche. L’inconvénient, ce sont les plis du soufflet mille fois pliés et dépliés, pliés dépliés, pliés dépliés, qui finissaient par se percer ! D’où des trous minuscules qui engendraient des surprises au développement. Ainsi des hommes noirs… Hé, hé (il rit) pouvaient devenir blancs !

 

- LA JEUNE : Quoi ? Qu’est-ce que c’est que ce plan ! Si le soufflet prend de la lumière, la pellicule s’imprime et tout est noir !

 

- LE VIEUX : Quoi encore mademoiselle « je sais tout ». Vous n’allez pas refaire l’histoire de la photographie !

- LA JEUNE : Là, c’est vous qui nous racontez des histoires !

 

- LE VIEUX : Absolument, je vous raconte des histoires de photographies et j’ai le droit d’illustrer mon propos de quelques anecdotes. (Il la menace) Et vous ne m’en empêcherez pas !

 

- LA JEUNE : C’est pas des anecdotes qu’il vous faut, c’est un antidote… contre la bêtise !

 

- LE VIEUX : Quoi les dots ? Les dots n’existent plus allons ! Vous devriez savoir ça à votre âge. Et s’il n’y a plus de dot, à quoi bon un « antidot » ! Déjà qu’on ne se marie plus, alors la dot… (Un temps)

Bref, revenons à la photo. L’étape suivante fut l’appareil REFLEX à diaphragme. Là encore un inconvénient : si le diaphragme se bloquait : hic ! On attrapait le hoquet ! Hic ! Et la photo était floue !

 

- LA JEUNE : De mieux en mieux ! On peut savoir le rapport entre le diaphragme de l’appareil et celui du photographe ?

 

- LE VIEUX : Parfaitement hic ! Mademoiselle hic !  C’est évident hic ! C’est lumineux ! C’est parce que l’appareil se portait sur le ventre hic ! (Il a un appareil sur le ventre et joint le geste à la parole) d’où l’interférence entre les deux diaphragmes, celui de l’appareil et le mien, hic !

 

- LA JEUNE (sidérée) : Alors là, je suis muette !

 

- LE VIEUX : Eh bien c’est parfait, hic ! Ça nous fera des vacances. Non mais ! (Un temps) Nous progressons encore dans le temps et par le matériel avec les appareils à rideau. Et là, problème : si le rideau se coinçait, on ne pouvait pas photographier la pièce !

 

- LA JEUNE : Quelle pièce ?

 

- LE VIEUX : Vous n’étiez pas muette vous ? La pièce ! La pièce ! La pièce qui se joue derrière le rideau. S’il y a trop de jeu, le rideau ne glisse plus, il se coince et… Et voilà ! On ne peut pas photographier la pièce. C’est simple à comprendre…

- LA JEUNE : (Se lève, prenant à témoin l’assistance) Mais il est malade !

 

- LE VIEUX : Je ne vous permets pas mademoiselle ! (Un temps) La sécurité s’il vous plaît ! Serait-il possible de faire sortir cette personne ? Vous insultez la photographie mademoiselle! Robert Doisneau et Arthus-Bertrand doivent se retourner dans leur tombe !

 

- LA JEUNE : Mais Arthus-Bertrand n’est pas mort !

 

 

 

 

 

- LE VIEUX : Hein ? Peut-être mais… Il doit se retourner quand même. La preuve, son vrai nom, c’est Bertrand Arthus !!! C’est plus logique non ?

Et justement, Bertrand Arthus est l’un des grands noms de la pellicule. Car, de pellicule, il n’y en a plus ! Terminé ! Aujourd’hui, on photographie avec un téléphone ! (il s’énerve) On entasse des centaines de clichés dans des ordinateurs ! On n’imprime plus de souvenirs ! Et des familles sans souvenirs, c’est comme un appareil sans pellicule ! C’est la faute aux shampoings ! Un chant c’est tout ! Heu… Un point c’est tout ! J’en appelle à tous les antipelliculaires pour qu’ils cessent leur campagne honteuse ! (Elle monte sur scène et essaie de l’emmener à l’écart. Il résiste. Il s’énerve encore plus. Il perd à nouveau ses feuillets) Les pellicules survivront ! Nous nous battrons ! Contre le numérique qui fait son numéro ! Que dis-je son numéro, SES numéros ! En millions de pixels ! Tous ces pixels mauvais pour la santé ! Le xel fait monter la tension des appareils et boum ! Tout explose ! (Il déjante complètement, perd ses feuilles. La jeune tente de le calmer, le prend par le bras et ils s’éloignent. Il continue à marmonner en sous texte…)

 

- LA JEUNE : (Revient seule en scène) Excusez-le, il est passé des ASA aux pixels trop rapidement. Sa matière focale s’est déréglée…

 

 

 

      FIN

 

 

 

 

 

 

 

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